Bien qu’il ait fallu plus de 35 ans à la science pour s’accorder sur ce point, les chiens ont réellement une capacité extraordinaire à détecter le cancer.
Ceux d’entre nous qui vivent avec des chiens et les aiment, savent que ce sont des créatures remarquables. Ce n’est que récemment que nous avons commencé à apprendre à quel point ils sont exceptionnels.
Avec environ 220 millions de récepteurs olfactifs (contre 5 millions pour nous), les chiens peuvent sentir des choses impossibles à détecter pour nous. Grâce à cet incroyable sens de l’odorat, les chiens ont été dressés pour identifier des dizaines de substances, notamment des drogues, des explosifs, des accélérateurs d’incendie criminel et des restes humains.
En fait, nous savons que les chiens peuvent distinguer l’odeur d’un rongeur à une distance de 50 mètres, celle d’une tortue sauvage à 60 mètres, celle de la chair en décomposition à 180 mètres et celle des excréments de baleine à plus d’un kilomètre.
D’innombrables études montrent également que les chiens peuvent détecter certaines maladies, comme la maladie de Parkinson et le SRAS-CoV-2, ainsi que l’apparition d’affections telles que les crises d’épilepsie, l’hypoglycémie ou l’hyperglycémie chez les diabétiques, et les migraines. Aujourd’hui, des preuves de plus en plus nombreuses suggèrent que les chiens peuvent également jouer un rôle dans la détection du cancer chez l’homme.
Mais comment se fait-il que les chiens puissent détecter des maladies, et plus particulièrement des cancers, simplement grâce à leur odeur ?
L’odeur de la maladie
Tout est lié à la composition du corps humain. Notre corps, comme presque tout ce qui se trouve dans notre environnement, émet des composés organiques volatils, un mélange de produits chimiques organiques qui se vaporisent à température ambiante et se dispersent dans l’air. Les êtres humains émettent continuellement des centaines de composés organiques volatils par le biais de processus biologiques et physiologiques normaux, comme lorsque nous ingérons de la nourriture ou par la décomposition de certaines bactéries dans notre corps (par exemple, l’odeur produite par la sueur).
C’est Hippocrate qui, vers 450 avant notre ère, a identifié pour la première fois plusieurs odeurs spécifiques à des maladies dans l’urine et les expectorations. Mais il a fallu attendre le début du 19e siècle pour que les scientifiques commencent à étudier le lien entre les odeurs humaines et la maladie, et découvrent que les composés organiques volatils liés à la maladie peuvent se diffuser dans les tissus et être rejetés dans l’haleine, les excréments, les sécrétions vaginales, la peau, la sueur, l’urine et le sang. Dans la seconde moitié du 20e siècle, la chromatographie en phase gazeuse et la spectroscopie de masse ont été utilisées pour séparer les composés organiques volatils et identifier les substances spécifiques au cancer dans ces excrétions humaines.
Comment les chiens détectent-ils le cancer ?
C’est alors que les chiens sont entrés en scène. Le premier cas connu de chien capable de détecter un cancer remonte à 1989, lorsque deux dermatologues britanniques ont rapporté que le chien d’une patiente avait reniflé à plusieurs reprises une grosseur sur sa jambe, même à travers ses vêtements, ce qui a finalement incité la femme à consulter son médecin. La grosseur s’est avérée être un mélanome malin.
Au début, les scientifiques étaient sceptiques et considéraient cette anecdote pour ce qu’elle était : une anecdote. Ce n’est qu’au début des années 2000 que leur intérêt a commencé à dépasser leur scepticisme, lorsque des études supplémentaires ont validé les soupçons antérieurs selon lesquels les chiens pouvaient effectivement renifler le cancer. Une étude expérimentale réalisée en 2004 a notamment montré que la capacité des chiens à détecter le cancer de la vessie dans l’urine était supérieure à ce que le hasard aurait pu laisser supposer. En outre, à la grande surprise des chercheurs, les chiens ont continué à identifier l’urine d’un participant en bonne santé comme étant positive pour le cancer. Inquiet, le médecin de cette personne a demandé des examens complémentaires et a découvert que cet individu « sain » était en fait atteint d’un cancer du rein à un stade très précoce.
En 2006, la première de ce qui allait devenir des dizaines d’études en double aveugle de grande qualité a été publiée. (Dans une étude en double aveugle, ni les chiens ni leurs maîtres ne savent quels échantillons sont cancéreux). Dans cette première étude, des échantillons d’haleine ont été prélevés sur 55 patientes atteintes d’un cancer du poumon et 31 patientes atteintes d’un cancer du sein. Des instruments spécialisés ont été incapables de détecter quoi que ce soit dans l’air expiré de ces patientes… et pourtant les chiens ont identifié 99 % des cancers du poumon et entre 88 et 98 % des cancers du sein.
Depuis, un nombre croissant d’études ont examiné la capacité des chiens à détecter avec précision les cancers du poumon, du sein, des ovaires, de la vessie et de la prostate. Par exemple, en 2021, une équipe de chercheurs britanniques a mené un essai clinique sur 246 patients âgés de 45 à 80 ans, dont 41 avaient été diagnostiqués à différents stades du cancer du poumon. Dans les résultats des tests combinés de l’haleine et de l’urine, le chien a correctement identifié 40 des 41 échantillons de cancer.
La même année, une équipe multinationale de scientifiques a démontré que les chiens pouvaient être dressés à détecter la forme la plus agressive et la plus mortelle du cancer de la prostate à partir des composés organiques volatils.
Le rôle du chien dans le diagnostic précoce du cancer
À propos de l’étude sur le cancer de la prostate, la Dr Claire Guest, directrice scientifique de Medical Detection Dogs, a déclaré : « Cette étude a montré que le flair d’un chien pourrait être la clé d’une méthode de diagnostic précoce du cancer de la prostate, plus précise et non invasive, dont on a besoin de toute urgence ».
Le besoin d’un diagnostic précis et précoce de tous les cancers est tout aussi urgent. Le cancer est la deuxième cause de mortalité dans le monde. Selon le National Cancer Institute, d’ici 2040, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer dans le monde devrait atteindre près de 30 millions et le nombre de décès liés au cancer plus de 15 millions. Le diagnostic précoce est le moyen le plus efficace de réduire les risques associés au cancer et de permettre aux malades d’avoir les meilleures chances de traitement et de survie.
Malgré tous les progrès réalisés au cours des 40 dernières années dans la lutte contre le cancer, les efforts de détection et d’intervention précoces font encore défaut. Le flair du chien joue un rôle important dans la tentative d’identification précoce du cancer, prouvant une fois de plus que le chien est bien le meilleur ami de l’homme.